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ARCHIVES VERLAINE 1872-1873 / PI�CES DE VERS DU "DOSSIER DE 1886"


     Si l'on excepte les "manuscrits Forain" du cycle de la soif (Com�die de la soif, Bonne pens�e du matin, La rivi�re de Cassis, Larme), les "manuscrits Richepin" du cycle de la patience (Banni�res de mai, Chanson de la plus haute tour, L'�ternit�, �ge d'or) et quelques autres po�mes au destin plus sp�cifique (Famille maudite, Les Corbeaux) la plupart des manuscrits de 1872 proviennent de ce que Steve Murphy appelle le dossier de 1886, c'est-�-dire le dossier de textes rimbaldiens d�tenus par Verlaine qui servit � l'�dition des Illuminations dans la revue La Vogue, en 1886.
     Outre les Illuminations, Verlaine conservait diverses po�sies de Rimbaud de la p�riode 72-73 (vingt selon mon compte) que sa m�re, peut-�tre, "avait r�cup�r�es dans la chambre de l'h�tel de Bruxelles, apr�s l'arrestation du 10 juillet 1873, et remises � son fils � sa sortie de prison" (J.-J. Lefr�re, Rimbaud, Fayard, 2001, p.943). � une date et dans un but dont nous ignorons tout, l'ensemble fut confi� par Verlaine � son beau-fr�re, Charles de Sivry, qui le communiqua � Gustave Kahn et L�o d'Orfer, �diteurs de La Vogue. � la suite de quoi plusieurs pi�ces versifi�es de 1872 (onze pi�ces exactement) furent incluses abusivement sous le titre Les Illuminations dans cette revue en 1886. Il �tait d'ailleurs pr�vu qu'il y en ait davantage mais un divorce intervenu entre les deux animateurs de la revue fit que la publication en feuilleton des po�mes de Rimbaud s'interrompit brutalement. Gustave Kahn et L�o d'Orfer s'�taient partag� les textes encore � publier. L'un d'entre eux fut r�cup�r� par Darzens pour son Reliquaire en 1891 ("Entends comme brame..."), cinq autres furent finalement publi�s dans les Po�sies compl�tes chez Vanier en 1895 (Patience, Jeune m�nage, M�moire, "Est-elle alm�e..", F�tes de la faim), les deux derniers connurent un destin plus capricieux, cf. notre tableau des modalit�s de transmission de l'�uvre de Rimbaud. Le tableau ci-dessous r�capitule ces donn�es :
 

11 po�mes
publi�s
par
La Vogue
Chanson de la plus haute tour
�ge d'or

"Nous sommes tes grands parents..."
�ternit�
"Qu'est-ce pour nous mon c�ur..."
L a Vogue n� 7
7 juin 1886

 

Michel et Christine
"Plates-bandes d'amarantes..."
Honte
La Vogue n�8
13 juin 1886
"Loin des oiseaux..."
"� saisons, � ch�teaux..."
"La rivi�re de cassis roule ..."
La Vogue n�9
21 juin 1886
9 po�mes
non-publi�s
par
La Vogue
"Entends comme brame..." Arthur Rimbaud Reliquaire
�d. Rodolphe Darzens, 1891
Patience
Jeune m�nage
M�moire

"Est-elle alm�e ? ..."
F�tes de la faim
Arthur Rimbaud, Po�sies compl�tes, L�on Vanier, 1895
"� quatre heures du matin, l'�t�..." �uvres de Arthur Rimbaud - Vers et proses, �d. Berrichon,
novembre 1912
brouillon de "� saisons, � ch�teaux..." Catalogue de vente Auguste Blaizot
24-25 mars 1931
Enfer de la soif Arthur Rimbaud, O.C.  I, Po�sies,
�d. Steve Murphy, Champion 1999


      Beaucoup de ces manuscrits, qui avaient fini par aboutir dans la collection Pierre Ber�s, n'�taient pas consultables jusqu'� tr�s r�cemment. Les anciennes �ditions les reproduisaient d'apr�s La Vogue, sans que leurs responsables aient pu v�rifier le texte. Mais ces manuscrits ("Nous sommes tes grands parents...", � saisons, � ch�teaux, �ge d'or, "La rivi�re de cassis roule...", Honte, "Qu'est-ce pour nous mon c�ur...", Michel et Christine, "Plates-bandes d'amarantes...") ont chang� de mains lors de la vente Ber�s du 20.06.06 et leurs fac-simil�s sont d�sormais consultables en format pdf sur :
http://www.bibliorare.com/vente-beres-juin-2006.htm (partie 8 du catalogue).
 

Titres

Fac-simil�s disponibles

Chanson de la plus haute tour  
�ge d'or catalogue vente Ber�s  p.216-217
"Nous sommes tes grands parents..." catalogue vente Ber�s  p.210-213
�ternit�  
"Qu'est-ce pour nous mon c�ur..." catalogue vente Ber�s  p.225-226
Michel et Christine catalogue vente Ber�s  p. 228-229
"Plates-bandes d'amarantes..." catalogue vente Ber�s  p. 230-231
Honte catalogue vente Ber�s  p.224-225
"Loin des oiseaux..."  
"� saisons, � ch�teaux..." catalogue vente Ber�s  p.214-215
"La rivi�re de cassis roule ..." catalogue vente Ber�s  p.222-223
ou
Sotheby's
"Entends comme brame..." http://rimbaudivre.blogspot.com/2011
/11/rimbaud-et-le-point-multiple-par-andre.html
Patience Collections Aristophil
Jeune m�nage https://archive.org/stream/
posies00rimb#page/100/mode/2up
M�moire http://abardel.free.fr/petite_anthologie/
memoire_manuscrit.htm
"Est-elle alm�e ? ..." http://rimbaudivre.blogspot.com/2011/11/
rimbaud-et-le-point-multiple-par-andre.html
F�tes de la faim https://archive.org/stream/
posies00rimb#page/102/mode/2up
"� quatre heures du matin, l'�t�..." Collections Aristophil
brouillon de "� saisons, � ch�teaux..." http://abardel.free.fr/petite_anthologie/
o_saisons.htm
Enfer de la soif  

    
     L'ordre de succession adopt� ici pour les pr�senter (voir ci-contre) consiste � placer d'abord les versions alternatives (non dat�es) des po�mes confi�s � Forain et Richepin (dont, par contre, nous connaissons la date : mai-juin 72), puis M�moire (dont la premi�re version connue, Famille maudite, est obligatoirement ant�rieure au 7 juillet 1872), puis des po�mes dat�s juin, juillet, ao�t 72, enfin les po�mes non-dat�s dont certains pourraient bien �tre de 1873.
     Les versions alternatives des po�mes de mai-juin 1872 contenues dans ce "dossier de 1886" (la plupart d'entre elles sans titres, sans majuscules en d�but de vers, et plus ou moins d�ponctu�es) constituent selon Steve Murphy des transcriptions post�rieures aux autographes d�tenus par Forain et Richepin : "Les manuscrits remis � Forain et Richepin semblent bien pr�c�der ceux du dossier de 1886, ce qu'on peut inf�rer des circonstances de leur transmission �tant confort� par l'analyse graphologique de ces documents" (SM-IV, 92). Une liste de nombres d�couverte au verso du po�me F�tes de la faim sugg�re que Rimbaud avait peut-�tre entrepris, � un moment donn�, entre juillet 72 (d�part de Paris) et juillet 73 (crise de Bruxelles), d'organiser en recueil ces po�mes du dossier de 1886. Car ces nombres (nombres de vers, �videmment) permettent d'identifier dans la plupart des cas les po�mes concern�s, parmi lesquels nous retrouvons, dans leur encha�nement connu, les cycles Richepin et Forain. Steve Murphy y voit m�me une explication possible au changement de titre op�r� par Rimbaud sur Banni�res de mai, devenu Patience. Souhaitant ins�rer les deux cycles dans un ensemble plus vaste et se voyant contraint d'abandonner le regroupement  intitul� F�tes de la patience, Rimbaud aurait voulu faire appara�tre au moins dans un des titres de la s�rie la notion cl� qu'il supprimait par ailleurs.
     Rappelons enfin que six de ces textes ont en outre �t� ins�r�s, sous une forme plus ou moins renouvel�e, dans Alchimie du verbe.

   























Enfer de la Soif
"Nous sommes tes grands parents ..."
"� quatre heures du matin .."
"La rivi�re de cassis roule ..."
"Loin des oiseaux..."
Patience
Chanson de la plus haute tour
�ternit�

�ge d'or
M�moire
Jeune M�nage (27 juin 1872)
"Est-elle alm�e..." (juillet 1872)
F�tes de la faim
(ao�t 1872)

"Plates-bandes d'amarantes..." (Juillet)
"Entends comme brame..."
Honte

Michel et Christine
"Qu'est-ce pour nous mon c�ur..."

"_saisons, � ch�teaux..."
"� saisons, � ch�teaux..." (brouillon)


 


Autographe divis� entre une collection particuli�re inconnue (parties 1,2,3) et la Fondation Bodmer, Cologny, pr�s de Gen�ve (parties 4,5). 

Nous connaissons deux autres versions de ce texte :
Com�die de la soif > Manuscrits Forain des po�mes de 1872

"Nous sommes tes grands-parents > Pi�ces de vers du "dossier de 1886"
 

      Enfer de la Soif

                     1. Les parents.

Nous sommes tes Grands-Parents,
           Les Grands !
Couverts des froides sueurs
De la lune et des verdures.
Nos vins secs avaient du c�ur !
Au soleil sans imposture
Que faut-il � l'homme ? boire...
Moi Mourir aux fleuves barbares.
Nous sommes tes Grands-Parents
             Des champs,
L'eau est au fond des osiers ...
Vois le courant du foss�
Autour du Ch�teau mouill�.
Descendons en nos celliers ;
Apr�s, le cidre, ou le lait.
Moi Aller o� boivent les vaches.
Nous sommes tes Grands-Parents ;
               Tiens, prends
Les liqueurs dans nos armoires ;
Le Th�, le Caf�, si rares,
Fr�missent dans les bouilloires.
Vois les images, les fleurs.
Nous rentrons du cimeti�re
Moi Ah tarir toutes les urnes.

 
2. De l'Esprit.

�ternelles Ondines,
   Divisez l'eau fine ;
V�nus s�ur de l'Azur
   �meus le flot pur ;
Juifs errants de Norw�ge
   Dites-moi la neige ;
Anciens Exil�s chers
   Dites-moi la mer.

Moi � 
 
Non, plus ces boissons pures,
   Ces fleurs d'eau pour verres ;
L�gendes ni figures
   Ne me d�salt�rent ;
Chansonnier, ta filleule
   C'est ma soif si folle
Hydre intime sans gueule
   Qui mine et d�sole.

 

3. Des amis.

Viens, les Vins vont aux plages ;
Et les flots par millions !
Vois les Bitters sauvages
Rouler du haut des monts.
 
Gagnons, p�lerins sages
L'Absinthe aux verts piliers...

Moi � 
 
Plus ces paysages.
Qu'est l'ivresse, amis ?
 
J'aime autant, mieux, m�me,
Pourrir dans l'�tang
Sous l'affreuse cr�me
Pr�s des bois flottants.
   


 
       4. Chanson
 
Peut-�tre un Soir m'attend
O� je boirai tranquille
En quelque bonne ville
Et mourrai plus content :
Puisque je suis patient
 
Si mon mal se r�signe
Si j'ai jamais quelque or
Choisirai-je le Nord
Ou le Pays des Vignes ?...
Ah songer est indigne
 
Puisque c'est pure perte
Et si je redeviens
Le voyageur ancien
Jamais l'auberge verte
Ne peut bien m'�tre ouverte
 

         5. 
 
Les pigeons qui tremblent dans la prairie
Le gibier, qui court et qui voit la nuit
Les b�tes des eaux la b�te asservie
Les derniers papillons ... ont soif aussi.
 
Mais fondre o� fond ce nuage sans guide !
� favoris� de ce qui est frais 
Expirer en ces violettes humides
Dont les aurores chargent ces for�ts !
 
                                          A. Rimbaud

 Sommaire

 



"Nous sommes tes grands-parents ..."

Autographe de la collection Ber�s (aujourd'hui : coll. Fran�ois-Marie Banier)

Nous connaissons deux autres versions de ce texte :
Com�die de la soif > Manuscrits Forain des po�mes de 1872
Enfer de la soif > Pi�ces de vers du "dossier de 1886"

Celle-ci est probablement post�rieure aux deux pr�c�dentes.

Premi�re publication dans La Vogue 1886 :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b86
10832j/f77.image
Tronqu�e aux vers : "et mourrai plus content : / Puisque je suis patient.", par suite d'une d�chirure du manuscrit � cet endroit comme le montre le document issu de la collection Ber�s :

    

                                            

Nous sommes tes grands-parents
           les Grands ;
couverts des froides sueurs
de la terre et des verdures.
Nos vins secs avaient du c�ur.
Au soleil sans imposture
que faut-il � l'Homme ? boire...
Moi Mourir aux fleuves barbares
Nous sommes tes grands-parents
             des champs..
L'eau est au fond des osiers ...
vois le courant du foss�
autour du Ch�teau mouill�...
descendons en nos celliers :
apr�s, le cidre, ou le lait...
Moi Aller o� boivent les vaches
Nous sommes tes grands-parents :
               tiens, prends
les liqueurs dans nos armoires.
Le th�, le caf�, si rares,
fr�missent dans les bouilloires.
Vois les images, les fleurs :
nous rentrons du cimeti�re...
Moi Ah ! tarir toutes les urnes
  �ternelles Ondines,
   divisez l'eau fine ;
V�nus ! s�ur de l'azur,
   �meus le flot pur.
Juifs errants de Norw�ge
   dites-moi la neige
anciens Exil�s chers
   dites-moi la mer...

Non, plus ces boissons pures,
   ces fleurs d'eau pour verres ;
l�gendes ni figures
   ne me d�salt�rent ;
chansonnier, ta filleule
   c'est ma soif si folle ;
hydre intime, sans gueule,
   qui mine et d�sole !
  Viens ! les Vins vont aux plages,
et les flots par millions !
Vois le bitter sauvage
rouler du haut des monts ;
  gagnons, p�lerins sages,
l'absinthe aux verts piliers...

Moi

Plus ces paysages.
   Qu'est l'ivresse, amis ?

    J'aime autant, mieux, m�me,
    pourrir dans l'�tang
    sous l'affreuse cr�me
    pr�s des bois flottants.

  Peut-�tre un Soir m'attend
o� je boirai tranquille
en quelque bonne ville,
et mourrai plus content :
Puisque je suis patient.
 
Si mon mal se r�signe,
si jamais j'ai quelque or,
choisirai-je le Nord
ou les pays des vignes ?...
Ah ! songer est indigne
 
puisque c'est pure perte ;
et si je redeviens
le voyageur ancien
jamais l'auberge verte
ne peut bien m'�tre ouverte. 
Les pigeons qui tremblent dans la prairie ;
le gibier, qui court et qui voit la nuit ;
les b�tes des eaux, la b�te asservie ;
les derniers papillons ; ont soif aussi.
 
Mais fondre o� fond ce nuage sans guide ...
oh ! favoris� de ce qui soit frais, 
expirer en ces violettes humides
dont les aurores chargent ces for�ts.
 
                                          Arthur Rimbaud

 

Sommaire


 


"� quatre heures du matin..."

Autographe appartenant � une collection particuli�re.

Nous connaissons une version ant�rieure de ce texte :
Bonne pens�e du matin > Manuscrits Forain des po�mes de 1872

Celle-ci est probablement post�rieure � la pr�c�dente.

Rappelons aussi la version int�gr�e � Alchimie du verbe dans Une saison en enfer

 

    
 

      
� quatre heures du matin l'�t�
le sommeil d'amour dure encore
dans les bosquets l'aube �vapore
          l'odeur du soir f�t�

Or l�-bas dans l'immense chantier
vers le soleil des Hesp�rides
en bras de chemise les charpentiers
          d�j� s'agitent

Dans leurs d�serts de mousse tranquilles
ils pr�parent les lambris pr�cieux
o� la richesse de la ville
      rira sous de faux cieux

� pour ces ouvriers charmants
sujets d'un roi de Babylone
V�nus ! laisse un peu les amants
     dont l'�me est en couronne

          � Reine des Bergers
porte aux travailleurs l'eau-de-vie
pour que leurs forces soient en paix
en attendant le bain dans la mer � midi

Sommaire

 


 


"La rivi�re de cassis roule..."

Autographe. Collection priv�e.

Nous connaissons une autre version de ce texte : La rivi�re de Cassis > Manuscrits Forain des po�mes de 1872. Celle-ci est probablement post�rieure � la version Forain. Rappelons aussi la version int�gr�e � Alchimie du verbe dans Une saison en enfer
  
Ci-contre : fac-simil� �dit� � l'occasion de la
vente Pierre Ber�s de 2006.

 Le manuscrit, mis en vente avec la collection Ber�s le 20 juin 2006, est reparu chez Sotheby's le 8 f�vrier 2017. Un meilleur fac-simil� a �t� mis en ligne � cette occasion. :  http://www.bibliorare.com/products/rimbaud-arthurla-riviere-de-cassis-1872/ 

Ci-contre : autre fac-simil� issu de la vente chez Sotheby's.

 La rivi�re de cassis roule ignor�e
          � des vaux �tranges
la voix de cent corbeaux l'accompagne vraie
          et bonne voix d'anges
avec les grands mouvements des sapinaies
          o� plusieurs vents plongent.

Tout roule avec des myst�res r�voltants
          de campagnes d'ancien temps
de donjons visit�s de parcs importants 
          c'est en ces bords qu'on entend
les passions mortes des chevaliers errants
          mais que salubre est le vent.

Que le pi�ton regarde � ces clairevoies
          il ira plus courageux
soldats des for�ts que le Seigneur envoie
          chers corbeaux d�licieux
faites fuir d'ici le paysan matois
          qui trinque d'un moignon vieux.

Sommaire 




 

"Loin des oiseaux ..."  

Autographe de la collection Pierre Ber�s. 

Nous connaissons une version ant�rieure de ce texte :
Larme > Manuscrits Forain des po�mes de 1872

Celle-ci est probablement post�rieure � la pr�c�dente.

Rappelons aussi la version int�gr�e � Alchimie du verbe dans Une saison en enfer

 

            

Loin des oiseaux des troupeaux des villageoises
je buvais � genoux dans quelque bruy�re
entour�e de tendres bois de noisetiers
Par un brouillard d'apr�s-midi ti�de et vert

Que pouvais-je boire dans cette jeune Oise
ormeaux sans voix gazon sans fleurs ciel couvert
boire � ces gourdes vertes loin de ma case
claire quelque liqueur d'or qui fait suer

effet mauvais pour une enseigne d'auberge.
Puis l'orage changea le ciel jusqu'au soir
ce furent des pays noirs des lacs des perches
des colonnades sous la nuit bleue des gares

l'eau des bois se perdait sur les sables vierges
le vent de Dieu jetait des gla�ons aux mares
et tel qu'un p�cheur d'or et de coquillages
dire que je n'ai pas eu souci de boire          

Sommaire

 



Autographe.
Anciennement, collection Pierre Ber�s.
Acquis par Charleville en juin 2018. 

Non-dat�. 

Nous connaissons une version ant�rieure de ce texte :
Banni�res de mai > Manuscrits Richepin

Celle-ci est probablement post�rieure � la pr�c�dente.

 

 

Manuscrit et commentaire

           Patience

                                                  D'un �t�

Aux branches claires des tilleuls
Meurt un maladif hallali.
Mais des chansons spirituelles
Voltigent partout les groseilles.
Que notre sang rie en nos veines
Voici s'enchev�trer les vignes.
Le ciel est joli comme un ange
Azur et onde communient.
Je sors. Si un rayon me blesse,
Je succomberai sur la mousse.
 
Qu'on patiente et qu'on s'ennuie,
C'est trop simple !... Fi de ces peines !
Je veux que l'�t� dramatique
Me lie � son char de fortune.
Que par toi beaucoup, � Nature,
Ah ! moins nul et moins seul ! je meure,
Au lieu que les Bergers, c'est dr�le,
Meurent � peu pr�s par le monde.
 
Je veux bien que les saisons m'usent.
� toi, Nature ! je me rends,
Et ma faim et toute ma soif ;
Et, s'il te pla�t, nourris, abreuve.
Rien de rien ne m'illusionne ;
C'est rire aux parents, qu'au soleil ;
Mais moi je ne veux rire � rien ;
Et libre soit cette infortune. 

Sommaire

 


Autographe de la collection Jean Bonna.

Version imprim�e de La Vogue.

Non dat�.

Nous connaissons une version ant�rieure de ce texte :
Chanson de la plus haute tour > Manuscrits Richepin

Celle-ci est probablement post�rieure � la pr�c�dente.

Rappelons aussi la version int�gr�e � Alchimie du verbe dans Une saison en enfer

Chanson de la plus haute Tour

Oisive jeunesse
� tout asservie,
Par d�licatesse
J'ai perdu ma vie.
Ah! que le temps vienne
O� les c�urs s'�prennent !

Je me suis dit : Laisse,
Et qu'on ne te voie.
Et sans la promesse
De plus hautes joies.
Que rien ne t'arr�te,
Auguste retraite.

� mille veuvages
De la si pauvre �me
Qui n'a que l'image
De la Notre-Dame :
Est-ce que l'on prie
La vierge Marie ?

J'ai tant fait patience
Qu'� jamais j'oublie.
Craintes et souffrances
Aux cieux sont parties
Et la soif malsaine
Obscurcit mes veines.

Ainsi la Prairie
� l'oubli livr�e ;
Grandie, et fleurie
D'encens et d'ivraies ;
Au bourdon farouche
De cent sales mouches.

Oisive jeunesse
� tout asservie,
Par d�licatesse
J'ai perdu ma vie.
Ah! que le temps vienne
O� les c�urs s'�prennent !

Sommaire

 


Autographe.

Manuscrit inconnu. Aurait �t� vu par Paul Hartmann en 1957 (SM-I p.766)

Version imprim�e de La Vogue.

Non dat�.

Nous connaissons une version ant�rieure de ce texte :
L'�ternit� > Manuscrits Richepin

Celle-ci est probablement post�rieure � la pr�c�dente.

Rappelons aussi la version int�gr�e � Alchimie du verbe dans Une saison en enfer

 

     �ternit�

Elle est retrouv�e.
Quoi ?  L'�ternit�.
C'est la mer all�e
Avec le soleil.
 
�me sentinelle,
Murmurons l'aveu
De la nuit si nulle
Et du jour en feu.
 
Des humains suffrages,
Des communs �lans,
Donc tu te d�gages :
Tu voles selon...
 
Jamais l'esp�rance,
Pas d'orietur,
Science avec patience...
Le supplice est s�r.

De votre ardeur seule
Braises de satin,
Le Devoir s'exhale
Sans qu'on dise : enfin.
 
Elle est retrouv�e.
Quoi ? L'�ternit�.
C'est la mer all�e
Avec le soleil.

Sommaire



 

Autographe de la collection Pierre Ber�s.

Non dat�.

Nous connaissons une version ant�rieure de ce texte :
�ge d'or > Manuscrits Richepin

Celle-ci est probablement post�rieure � la pr�c�dente.

 

 

    

          �ge d'or

Quelqu'une des voix,
� Est-elle ang�lique !
Il s'agit de moi,
Vertement s'explique :
Ces mille questions
Qui se ramifient
N'am�nent, au fond,
Qu'ivresse et folie.

terque quaterque {

Reconnais ce tour
Si gai, si facile ;
C'est tout onde et flore :
Et c'est ta famille !
Et puis une voix
Est-elle ang�lique ! 
Il s'agit de moi,
Vertement s'explique ;
Et chante � l'instant
En s�ur des haleines ;
D'un ton Allemand,
Mais ardente et pleine :
Le monde est vicieux ;
Tu dis ? tu t'�tonnes ?
Vis ! et laisse au feu
L'obscure infortune...

pluri�s{

O joli ch�teau !
Que ta vie est claire !
De quel Age es-tu.
Nature princi�re
De notre grand fr�re.

indesinenter {

Je chante aussi, moi !
Multiples s�urs ; voix
Pas du tout publiques !
De gloire pudique
Environnez-moi.

Sommaire



 
Autographe. Coll. Fran�ois-Marie Banier

Nous connaissons une version ant�rieure de ce texte : Famille maudite

Celle-ci est probablement post�rieure � la pr�c�dente.

     Il existe deux versions de M�moire :

    
La premi�re, chronologiquement parlant, est certainement le po�me intitul� Famille maudite, manuscrit r�v�l� par la vente publique du 25 mai 2004. Les majuscules en d�but de vers et la nature des variantes existant entre cette version et le texte intitul� M�moire, connu de longue date, ne laisse aucun doute sur l'ant�riorit� de Famille Maudite. La d�couverte de ce premier �tat du po�me dans les archives de la famille Maut� (belle-famille de Verlaine) fait penser que cette transcription a �t� r�alis�e au printemps 72, avant le d�part du 7 juillet pour l'Angleterre via la Belgique, puis que le po�me a �t� repris ult�rieurement (de m�moire ?), pour parvenir au texte que nous connaissons.

     La seconde est le po�me non-dat� intitul� "M�moire" (ci-contre). On notera l'absence de majuscules en d�but de vers. Le manuscrit comporte quelques surcharges int�ressantes :
     - Aux v.3 et 5, les mots "pur" et "Non" sont entour�s de l�g�res parenth�ses, parenth�ses que l'on retrouve dans la marge, en vis-�-vis, entourant � deux reprises le mot "(ou)" : ceci laisse � penser que Rimbaud a envisag� de remplacer ces monosyllabes par la conjonction de coordination "ou".
     - au v.26, "saint lit" surcharge "sentier".
     - au v.29, "pleure" surcharge "murmure".
     - au v.34, Rimbaud a �crit "mon" au dessus de "canot" puis l'a barr�; il a �crit "mes" au-dessus de "bras" puis l'a barr�.

Commentaire

                              M�moire

L'eau claire ; comme le sel des larmes d'enfance,
l'assaut au soleil des blancheurs des corps de femmes ;
la soie, en foule et de lys pur, des oriflammes
sous les murs dont quelque pucelle eut la d�fense ;

l'�bat des anges ; Non... le courant d'or en marche,
meut ses bras, noirs, et lourds, et frais surtout, d'herbe. Elle
sombre, avant le Ciel bleu pour ciel-de-lit, appelle
pour rideaux l'ombre de la colline et de l'arche.


                               2

Eh ! l'humide carreau tend ses bouillons limpides !
L'eau meuble d'or p�le et sans fond les couches pr�tes.
Les robes vertes et d�teintes des fillettes
font les saules, d'o� sautent les oiseaux sans brides.

Plus pure qu'un louis, jaune et chaude paupi�re,
le souci d'eau ta foi conjugale, � l'�pouse !
au midi prompt, de son terne miroir, jalouse
au ciel gris de chaleur la Sph�re rose et ch�re.


                               3

Madame se tient trop debout dans la prairie
prochaine o� neigent les fils du travail ; l'ombrelle
aux doigts ; foulant l'ombelle ; trop fi�re pour elle
des enfants lisant dans la verdure fleurie

leur livre de maroquin rouge ! H�las, Lui, comme
mille anges blancs qui se s�parent sur la route,
s'�loigne par-del� la montagne ! Elle, toute
froide, et noire, court ! apr�s le d�part de l'homme !


                                4

Regret des bras �pais et jeunes d'herbe pure !
Or des lunes d'avril au c�ur du saint lit ! Joie
des chantiers riverains � l'abandon, en proie
aux soirs d'ao�t qui faisaient germer ces pourritures.

Qu'elle pleure � pr�sent sous les remparts ! l'haleine
des peupliers d'en haut est pour la seule brise.
Puis, c'est la nappe, sans reflets, sans source, grise :
un vieux, dragueur, dans sa barque immobile, peine.


                                 5

Jouet de cet �il d'eau morne, je n'y puis prendre,
� canot immobile ! oh ! bras trop courts ! ni l'une
ni l'autre fleur : ni la jaune qui m'importune,
l� ; ni la bleue, amie � l'eau couleur de cendre.

Ah ! la poudre des saules qu'une aile secoue !
Les roses des roseaux d�s longtemps d�vor�es !
Mon canot, toujours fixe ; et sa cha�ne tir�e
au fond de cet �il d'eau sans bords, � quelle boue ?

 

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Autographe donn� par Rimbaud � Forain.

Collection Pierre Leroy. 

Dat� du 27 juin 1872.

     Le vers 15 de ce po�me pose un probl�me d'�dition particulier. En effet, Rimbaud avait d'abord �crit :
     "M�me des fant�mes des eaux, errants"
Puis, il a not� en bas de page un vers alternatif :
     "M�me des esprits des eaux, malfaisants"
On voit clairement sur le manuscrit que c'est le premier �diteur (L�on Vanier, 1895) qui a barr� le premier de ces deux vers, et par cons�quent op�r� un choix que Rimbaud avait diff�r�.

 

        

 

 
               Jeune m�nage

La chambre est ouverte au ciel bleu-turquin,
Pas de place : des coffrets et des huches !
Dehors le mur est plein d'aristoloches
O� vibrent les gencives des lutins.
 
Que ce sont bien intrigues de g�nies
Cette d�pense et ces d�sordres vains !
C'est la f�e africaine qui fournit
La m�re, et les r�silles dans les coins.
 
Plusieurs entrent, marraines m�contentes,
En pans de lumi�re dans les buffets,
Puis y restent ! le m�nage s'absente
Peu s�rieusement, et rien ne se fait.
 
Le mari�, a le vent qui le floue
Pendant son absence, ici, tout le temps.
M�me des esprits des eaux, malfaisants
Entrent vaguer aux sph�res de l'alc�ve.
 
La nuit, l'amie oh ! la lune de miel
Cueillera leur sourire et remplira
De mille bandeaux de cuivre le ciel.
Puis ils auront affaire au malin rat.
 
� S'il n'arrive pas un feu follet bl�me,
Comme un coup de fusil, apr�s des v�pres.
� � Spectres saints et blancs de Bethl�em,
Charmez plut�t le bleu de leur fen�tre !

                         A.Rimbaud
                         27 Juin 1872

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"Plates-bandes d'amarantes..."

Autographe de la collection Pierre Ber�s.

Date incertaine.

   Je tente de respecter, ci-contre, ce qu'on peut voir sur ce manuscrit, exception faite du titre-incipit qui ne s'y trouve pas.
   Steve Murphy, dans son article "Chantier d'une r�volution po�tique : les manuscrits rimbaldiens de la vente B�r�s" (Histoires litt�raires n�27), �met des hypoth�ses susceptibles de changer la fa�on traditionnelle d'�diter ce texte :
   1) Le mot "Juillet", contre la marge de gauche, a �t� soulign� par Rimbaud. S.M. en d�duit que le po�te a, dans un premier temps, simplement indiqu� cette date sur le m�me plan que les lieux (en vis � vis, sur la droite), comme une sorte d'en-t�te �pistolaire, puis a d�cid� de faire de "Juillet" le titre du po�me.
   2) Il ne s'agirait donc pas n�cessairement d'une datation (Rimbaud, quand il date, le fait en bas du po�me) mais plut�t du renvoi � un �v�nement v�cu. La plupart des commentateurs datent cependant ce texte de juillet 1872 (ou des mois qui suivent, ajoute prudemment SM). Selon LF, les "similitudes ponctuelles" (voir le v.5 de "Est-elle alm�e") et le "traitement semblable des images" invitent � assigner une date identique � "Plates-bandes d'amaranthes..." et � "Est-elle alm�e", texte qui est dat� par Rimbaud : "Juillet 1872".
   3) Le manuscrit est �rod� dans la partie sup�rieure du bord droit et laisse voir, � la fin du vers 3, l'attaque d'une lettre. Ce pourrait �tre un "P", toujours d'apr�s S.M. qui, compte tenu du syst�me rimique du quatrain, propose : "P�re". Je mentionne cette hypoth�se entre crochets.

 Ce manuscrit a chang� de mains lors de la vente Ber�s du 20.06.06. Le fac-simil� est consultable en format pdf sur : http://www.bibliorare.com/cat-vent_
beres20-6-06-2-8.pdf

 

               
 

Juillet.            

       Bruxelles,        
Boulevart du R�gent,

Platebandes d'amaranthes jusqu'�
L'agr�able palais de Jupiter.
Je sais que c'est Toi, qui, dans ces lieux, P[�re,]
M�les ton Bleu presque de Sahara !
 
Puis, comme rose et sapin du soleil
Et liane ont ici leurs jeux enclos,
Cage de la petite veuve !.....
                                       Quelles
Troupes d'oiseaux ! o, ia io, iaio !...
 
Calmes maisons, anciennes passions !
Kiosque de la Folle par affection.
Apr�s les fesses des rosiers, balcon
Ombreux et tr�s bas de la Juliette.
 
La Juliette, �a rappelle l'Henriette,
Charmante station du chemin de fer,
Au c�ur d'un mont, comme au fond d'un verger
O� mille diables bleus dansent dans l'air !
 
Banc vert o� chante au paradis d'orage,
Sur la guitare, la blanche Irlandaise.
Puis, de la salle � manger guyanaise,
Bavardage des enfants et des cages.
 
Fen�tre du duc qui fais que je pense
Au poison des escargots et du buis
Qui dort ici-bas au soleil.     Et puis
C'est trop beau ! trop ! Gardons notre silence.
 
Boulevart sans mouvement ni commerce,
Muet, tout drame et toute com�die,
R�union des sc�nes infinie,
Je te connais et t'admire en silence.
 

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"Est-elle alm�e ?..."

 Autographe de la collection Pierre Leroy.

Dat� de juillet 1872. 

Steve Murphy, se fondant sur l'�tat et la disposition du feuillet contenant ce texte sans titre, suppose qu'il s'agit de la fin d'un po�me dont le d�but serait perdu (SM-IV, p.567).

                        

Est-elle alm�e ?... aux premi�res heures bleues
Se d�truira-t-elle comme les fleurs feues...
Devant la splendide �tendue o� l'on sente
Souffler la ville �norm�ment florissante !
 
C'est trop beau ! c'est trop beau ! mais c'est n�cessaire
Pour la P�cheuse et la chanson du Corsaire,
Et aussi puisque les derniers masques crurent
Encore aux f�tes de nuit sur la mer pure !

                                                                 Juillet 1872
                                                                           A.R.

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Autographe du Mus�e-Biblioth�que Arthur Rimbaud de Charleville. Dat� d'ao�t 1872.

     Le manuscrit porte des corrections que les �ditions des derni�res ann�es du XXe si�cle consid�raient � tort comme allographes alors qu'elles sont de la main de Rimbaud, d'o� les discordances entre AA, JLS, PB, par exemple, et LF (2004) qui corrige, comme le faisaient les �ditions plus anciennes : la premi�re pl�iade, par exemple (ARR, p.138).

     Nous signalons entre crochets les corrections apport�es par Rimbaud et en italiques les passages barr�s sur le manuscrit.
 
     
     Nous pr�f�rons proc�der ainsi plut�t que de substituer les unes aux autres. En effet, les �ditions qui corrigent nous semblent butter sur une difficult� insurmontable au vers 11.
     Devant "Les cailloux", on lit,  en marge, dans le manuscrit : "Mangez", d'une m�me encre et dans la m�me �criture qui ont servi pour les corrections. Sans doute Rimbaud s'est-il rendu compte que la correction du vers 9 entra�nait une incoh�rence syntaxique : "les cailloux", primitivement COD de "paissez", peuvent difficilement devenir un compl�ment d'objet de "attirez". D'o� l'ajout de "Mangez", qui r�tablit la logique mais produit un vers faux. Il semble que la correction ne soit pas achev�e : elle le sera dans Alchimie du verbe >
Une saison en enfer.
    LF n�glige purement et simplement cette indication. Mais un �diteur peut-il retenir quatre corrections et en rejeter une, d�s lors que leur authenticit� � toutes est reconnue ; un �diteur peut-il choisir d'�viter un vers faux au prix d'une incoh�rence syntaxique ? ARR ins�rait le verbe "Mangez" entre deux vers, comme une sorte de vers suppl�mentaire : cela reste �trange et insuffisamment clair, pour le lecteur.
     

 

          F�tes de la faim

Ma faim, Anne, Anne,
Fuis sur ton �ne.

 

Si j'ai du go�t, ce n'est gu�res
Que pour la terre et les pierres
Dinn ! dinn ! dinn ! dinn ! Je pais l'air,
Le roc, les terres, le fer.


     [Mangeons l'air]
     [les  charbons]
    
Tournez, les faims ! paissez, faims,
          Le pr� des sons !
Puis l'humble et vibrant venin
          Des liserons ;
      [Mes faims, tournez. Paissez, faims,]

     [Attirez le gai venin]
Les cailloux qu'un pauvre brise,
Les vieilles pierres d'�glises,
Les galets, fils des d�luges,
Pains couch�s aux vall�es grises !
      [Mangez] devant "Les cailloux"
Mes faims, c'est les bouts d'air noir ;
          L'azur sonneur ;
C'est l'estomac qui me tire.
          C'est le malheur.
Sur terre ont paru les feuilles :
Je vais aux chairs de fruits blettes.
Au sein du sillon je cueille
La doucette et la violette.
          Ma faim, Anne, Anne !
          Fuis sur ton �ne.

                                         A.R.
                                 Ao�t 1872

 

 

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"Entends comme brame..." 

Autographe d�tenu par Verlaine.

Localisation inconnue.

Non dat�. On notera malgr� tout l'absence fr�quente de majuscules en d�but de vers qui sugg�re une date ... assez tardive.

    

Entends comme brame
pr�s des acacias
en avril la rame
viride du pois !
 
Dans sa vapeur nette,
vers Ph�b� ! tu vois
s'agiter la t�te
de saints d'autrefois...
 
Loin des claires meules
des caps, des beaux toits,
ces chers Anciens veulent
ce philtre sournois...
 
Or ni f�riale
ni astrale ! n'est
la brume qu'exhale
ce nocturne effet.
 
N�anmoins ils restent,
Sicile, Allemagne,
dans ce brouillard triste
et bl�mi, justement !

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Autographe de la collection Pierre Ber�s.

Non dat�.

"Pour les po�mes dits de 1872, nous avons insist� sur l'incertitude concernant les dates de composition de plusieurs des po�mes, et non des moindres, des arguments pouvant �tre avanc�s en faveur de 1873 pour certains (principalement Honte, avec sa r�f�rence � Roche, que Rimbaud ne semble pas avoir visit� entre 1870 et 1872 et "� saisons..." � cause du brouillon qui pourrait sugg�rer que le po�me a �t� compos� pour �tre ins�r� dans Une saison en enfer ; les deux hypoth�ses restent forc�ment d'une valeur incertaine)."

Steve Murphy, "�diter Rimbaud", AR � l'aube d'un nouveau si�cle, Klincksieck, 2006, p.74.

Ce manuscrit a chang� de mains lors de la vente Ber�s du 20.06.06. Le fac-simil� est consultable en format pdf sur : http://www.bibliorare.com/cat-vent_beres20-6-06-2-8.pdf

         

               Honte 

Tant que la lame n'aura
Pas coup� cette cervelle,
Ce paquet blanc, vert et gras
� vapeur jamais nouvelle,
 
(Ah ! Lui, devrait couper son
Nez, sa l�vre, ses oreilles,
Son ventre ! et faire abandon
De ses jambes ! � merveille !)
 
Mais, non, vrai, je crois que tant
Que pour sa t�te la lame
Que les cailloux pour son flanc
Que pour ses boyaux la flamme
 
N'auront pas agi, l'enfant
G�neur, la si sotte b�te,
Ne doit cesser un instant
De ruser et d'�tre tra�tre
 
Comme un chat des Monts-Rocheux ;
D'empuantir toutes sph�res !
Qu'� sa mort pourtant, � mon Dieu !
S'�l�ve quelque pri�re !
                

 Sommaire


 


Autographe de la collection Pierre Ber�s.

Non dat�. Selon Steve Murphy, ce po�me serait une r�plique parodique � "Malines" de Verlaine (Romances sans paroles), po�me du cycle belge dat� d'ao�t 1872. Ce qui impliquerait �videmment une date de r�daction ult�rieure.

Au vers 22, PH, suivi par PB et LF, lit "rougissant". Comme AA, nous pr�f�rons la lecture : "Rougis et", qui �tait celle de la premi�re �dition dans La Vogue.

Commentaire

Ce manuscrit a chang� de mains lors de la vente Ber�s du 20.06.06. Le fac-simil� est consultable en format pdf sur : http://www.bibliorare.com/cat-vent_beres20-6-06-2-8.pdf

                    Michel et Christine

Zut alors si le soleil quitte ces bords !
Fuis, clair d�luge ! Voici l'ombre des routes.
Dans les saules, dans la vieille cour d'honneur,
L'orage d'abord jette ses larges gouttes.

� cent agneaux, de l'idylle soldats blonds,
Des aqueducs, des bruy�res amaigries,
Fuyez ! plaine, d�serts, prairie, horizons
Sont � la toilette rouge de l'orage !

Chien noir, brun pasteur dont le manteau s'engouffre,
Fuyez l'heure des �clairs sup�rieurs ;
Blond troupeau, quand voici nager ombre et soufre,
T�chez de descendre � des retraits meilleurs.

Mais moi, Seigneur ! voici que mon Esprit vole,
Apr�s les cieux glac�s de rouge, sous les
Nuages c�lestes qui courent et volent
Sur cent Solognes longues comme un railway.

Voil� mille loups, mille graines sauvages
Qu'emporte, non sans aimer les liserons,
Cette religieuse apr�s-midi d'orage
Sur l'Europe ancienne o� cent hordes iront !

Apr�s, le clair de lune ! partout la lande,
Rougis et leurs fronts aux cieux noirs, les guerriers
Chevauchent lentement leurs p�les coursiers !
Les cailloux sonnent sous cette fi�re bande !

Et verrai-je le bois jaune et le val clair,
L'�pouse aux yeux bleus, l'homme au front rouge, � Gaule,
Et le blanc agneau Pascal, � leurs pieds chers,
Michel et Christine, et Christ ! fin de l'Idylle.

                                                                 A. Rimb.

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"Qu'est-ce pour nous Mon C�ur..."

Autographe.

Date incertaine

Coll. Fran�ois-Marie Banier

Ce manuscrit a chang� de mains lors de la vente Ber�s du 20.06.06. Le fac-simil� est consultable en format pdf sur : http://www.bibliorare.com/cat-vent_beres20-6-06-2-8.pdf

    

 

         


Qu'est-ce pour nous, Mon C�ur, que les nappes de sang
Et de braise, et mille meurtres, et les longs cris
De rage, sanglots de tout enfer renversant
Tout ordre ; et l'Aquilon encor sur les d�bris

Et toute vengeance ? Rien !... Mais si, toute encor,
Nous la voulons ! Industriels, princes, s�nats,
P�rissez ! puissance, justice, histoire, � bas !
�a nous est d�. Le sang ! le sang ! la flamme d'or !

Tout � la guerre, � la vengeance, � la terreur,
Mon esprit ! Tournons dans la Morsure : Ah ! passez,
R�publiques de ce monde ! Des empereurs,
Des r�giments, des colons, des peuples, assez !

Qui remuerait les tourbillons de feu furieux,
Que nous et ceux que nous nous imaginons fr�res ?
� nous ! Romanesques amis : �a va nous plaire.
Jamais nous ne travaillerons, � flots de feux !

Europe, Asie, Am�rique, disparaissez.
Notre marche vengeresse a tout occup�,
Cit�s et campagnes ! Nous serons �cras�s !
Les volcans sauteront ! et l'oc�an frapp�...

Oh ! mes amis ! mon c�ur, c'est s�r, ils sont des fr�res �,
Noirs inconnus, si nous allions ! allons ! allons !
� malheur ! je me sens fr�mir, la vieille terre,
Sur moi de plus en plus � vous ! la terre fond,

Ce n'est rien ! j'y suis ! j'y suis toujours.

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� saisons, � ch�teaux ...

Autographe de la collection Pierre Ber�s(aujourd'hui : coll. Fran�ois-Marie Banier)

Non dat�. Steve Murphy h�site entre 1872 et 1873. Voir sur ce point la notice du
brouillon de "� saisons, � ch�teaux..." et la citation de Steve Murphy dans notre notice sur Honte.

Ce manuscrit a chang� de mains lors de la vente Ber�s du 20.06.06. Le fac-simil� est consultable en format pdf sur : http://www.bibliorare.com/cat-vent_beres20-6-06-2-8.pdf

Remarques : 1-Les reprises en refrain du vers 1, en caract�res plus petits dans la dactylographie ci-contre, n'ont �t� ins�r�es qu'apr�s coup, dans l'interligne. 
2-Les trois derniers distiques, en italiques dans la dactylographie ci-contre, sont barr�s d'une croix, de fa�on peu appuy�e, sur le manuscrit. Certaines �ditions les reproduisent entre crochets, d'autres se contentent de les signaler en notes.
3-Le dernier vers ci-contre est barr� � l'encre.

Il existe deux autres versions :
- celle d'Alchimie du verbe dans
Une saison en enfer
- et un brouillon tr�s ratur�, pr�sentant des variantes nombreuses et int�ressantes. Voir ce brouillon.

Commentaire

 

 

� saisons, � ch�teaux,
Quelle �me est sans d�fauts ?
 
     � saisons, � ch�teaux,
 
J'ai fait la magique �tude
Du Bonheur, que nul n'�lude.
 
� vive lui, chaque fois
Que chante son coq gaulois.
 
Mais ! je n'aurai plus d'envie,
Il s'est charg� de ma vie.
 
Ce Charme ! il prit �me et corps,
Et dispersa tous efforts.
 
Que comprendre � ma parole ?
Il fait qu'elle fuie et vole !
 
      � saisons, � ch�teaux !

Et, si le malheur m'entra�ne,
Sa disgr�ce m'est certaine.

Il faut que son d�dain, las !
Me livre au plus prompt tr�pas !

� Saisons, � Ch�teaux !
Quelle �me est sans d�fauts ?

 

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� saisons, � ch�teaux ... (brouillon)

Autographe. Non dat�. Il n'est connu que par un fac-simil� publi� dans un catalogue de vente de 1931.

   Ce brouillon surcharg� et ratur� de "� saisons, �
ch�teaux ..." montre des variantes fort int�ressantes. Nous proposons une transcription dactylographique du manuscrit, la plus fid�le possible. Les passages marqu�s xxxx ou xxxx sont illisibles. Pour consulter le manuscrit, cliquer sur l'ic�ne ci-contre. Sur les probl�mes de transcription, cf. SM-I p.842-843 et 846-850.

   La critique admet l'ant�riorit�
de ce document par rapport � l'autographe de la collection Pierre Ber�s. La m�me tradition critique, influenc�e par la pr�sence d'une introduction en prose, consid�re souvent ce brouillon comme un travail pr�paratoire d'Une saison en enfer, ce qui embrouille fort la question chronologique. En effet, compte tenu des dates indiqu�es par Rimbaud pour la r�daction de la Saison (avril-septembre 73), il faudrait conclure que notre po�me ne date pas de 1872, comme le sugg�re sa parent� stylistique avec les "chansons spirituelles", mais du printemps 73, au plus t�t. Sauf � imaginer une gestation d'Alchimie du verbe beaucoup plus longue et sinueuse que ce que sugg�rent les dates indiqu�es par Rimbaud (cf. SM-IV, 576-577).

 


 


c'est pour dire que ce n'est rien, la vie
voil� donc les saisons

 

xxx saisons, xxx ch�teaux, En marge, devant "saisons", et devant "ch�teaux" :
O� court o� vole o� coule
L' �me n' est pas sans d�fauts En marge, devant "L'�me" : Quelle
 
J'ai fait la magique �tude
Du Bonheur, que nul n'�lude.
 
Chaque nuit son coq gaulois Au dessus du vers biff� : Je suis � lui chaque fois
Si chante son coq gaulois.
 
xxxxxxxxxxx rien : plus d'envie
Il s'est charg� de ma vie
 
Ce charme ! il prit �me et corps
Et dispersa mes efforts
 
En surcharge : Je me crois libre d'efforts
Quoi comprendre � ma parole
Il fait qu'elle fuie et vole
 
Oh ! si le malheur m'entra�ne
Sa disgr�ce m'est certaine
 
Il faut que son d�dain, las ! Au dessus : C'est pour moi / Au dessous : Soit pour moi
Me livre au plus prompt tr�pas

 

 

 

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